Thème
5 Intégration, conflits et changement social
Ch2 La conflictualité sociale :
pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social ?
Programme : On
montrera que les conflits peuvent être appréhendés à partir de grilles de
lecture contrastées : comme pathologie de l’intégration ou comme facteur
de cohésion ; comme moteur du changement social ou comme résistance au
changement. On s’intéressera plus particulièrement aux mutations des conflits
du travail et des conflits sociétaux en mettant en évidence la diversité des
acteurs, des enjeux, des formes et des finalités de l’action collective.
Mouvements
sociaux
régulation
des conflits
Syndicat
Problématiques :
- Les conflits sociaux
sont-ils une pathologie sociale ? S’ils sont un problème voire une menace
pour la société, pourquoi se maintiennent-ils ?
- Quel est le rôle des
conflits dans la transformation de la société ?
- Comment évoluent les enjeux
et les formes des conflits ?
Introduction Doc 1 poly
Mouvement lycéen, mouvement de grève,
conflit armé, conflit d’intérêt, conflit politique, conflit étudiant... sont
autant d’expressions qui renvoient à la diversité des mobilisations et des
conflits. Avant de nous intéresser en particulier aux conflits sociaux,
demandons-nous pourquoi un individu se mobilise-t-il.
Albert Hirschman (1970) dans son
livre Défection, prise de parole et loyauté (Exit, Voice, loyalty) a construit
une typologie qu’on nomme triptyque d’Hirschman pour décrire les différentes
réactions à la frustration relative :
– La « défection »
(exit) qui consiste en un changement silencieux
de situation : par exemple une démission.
– La « prise de parole
» « voice » qui consiste en une contestation visible visant le changement : par
exemple une grève.
– La (loyalty) qui
consiste en l’acceptation résignée et silencieuse des sources de
mécontentement.
Nous allons donc ici
nous intéresser à une forme particulière de réaction : « la prise de parole»
c’est-à-dire aux mouvements sociaux : Les mouvements sociaux sont un ensemble d’actions, de conduites et d’orientations collectives
remettant partiellement ou globalement en cause l’ordre social et cherchant à
le transformer.
Quand il y a des mouvements sociaux
ils sont la manifestation, l’expression de conflits sociaux sous-jacents.
Les conflits sociaux sont des conflits, des luttes, des affrontements entre des
groupes sociaux opposés par leurs intérêts, leur position ou leurs idées. Le
terme « conflit » désigne généralement des situations d'affrontements ouverts
et explicites tandis que l'idée de
conflit social prend acte du fait qu'une distribution inégale de ressources,
quelle que soit la nature de celles-ci, implique l'existence de conflits potentiels
: les divergences d'intérêts peuvent ensuite s'exprimer de différentes
façons, voire pas du tout.
Nous allons ici nous interroger sur
l’interprétation que les sociologues font des conflits. Que permettent-ils de
comprendre de la société ?
I. Conflits sociaux et intégration
A. Les conflits sociaux peuvent être analysés comme une pathologie sociale
2p258, 2 poly
B. Les conflits sociaux peuvent aussi être conçus comme facteurs d’intégration
3 poly, 4 poly, 3p261
II. Dans quelle mesure les conflits sociaux contribuent-ils au changement social ? 1p260
A. Les conflits provoquent des mutations de la société 2p260, ex1poly, 5 poly
B. Les conflits ne débouchent pas toujours sur le changement social voulu
4 p261Qpoly
III. Les conflits eux-mêmes évoluent
A. Les
types de conflits évoluent 3p265,
1p266, 2p266, 4p267
B. Les
formes des conflits se transforment (3p269),
1p270, 4p271
Document 1 :
1. Pourquoi d’après la théorie de la frustration relative un
individu se mobilise-t-il ?
2. Illustrez
la théorie de la frustration relative par un exemple de votre choix.
3. La frustration conduit-elle
nécessairement à la mobilisation ?
4. Quelle distinction pouvez vous faire entre conflit social
et mobilisation sociale ?
Document 2 : Conflits sociaux et fragilisation
du lien social
Au mois de novembre 2005, la France
a soudainement occupé les devants de la scène médiatique internationale. Les
propos les plus catastrophistes (comme ces reportages présentant la France
comme « à feu et à sang » alors que les émeutes n’ont pas occasionné une seule
mort d’homme) et les plus dénués de fondements (comme ceux mettant en cause la
religion musulmane) ont pu être entendus dans les médias français et étrangers.
Cela étant, il reste que ces émeutes sont inédites dans
l’histoire de la France
contemporaine : pour la première fois le phénomène n’est plus localisé, propre
au quartier où un drame (généralement la mort d’un jeune) est survenu ; il a
pris au contraire une dimension nationale, de Dunkerque à Nice et de Strasbourg
à Toulouse (…).
A travers ces entretiens avec les émeutiers, nous voyons
ainsi apparaitre les raisons de leur colère, les différents types d’humiliation
qu’ils subissent dans leur vie quotidienne : Dans les relations avec la police,
dans l’absence de travail qui découle de leur échec scolaire précoce et, en fin
de compte, dans le sentiment d’être des citoyens de seconde zone, presque des «
parias » comme le dit l’un des émeutiers à la fin d’un entretien. Le fond de
leur révolte est donc constitué par des sentiments d’injustice, d’abandon, de
rejet, d’absence d’avenir et de cynisme du reste de la société, qui structurent
un très fort sentiment d’injustice, finissent par constituer une mentalité de «
victimation collective » et par justifier et libérer leur colère dans le moment
de l’émeute (Mucchielli, 2003). Enfin, les
émeutiers se sentent d’autant plus
légitimes dans leur colère que cette dernière est partagée par une large partie
de la population de leurs quartiers.
Laurent
Mucchielli et Abderrahm Ait-Omar, « Les émeutes de l’automne 205 dans les
banlieues françaises du point du vue des émeutiers », RIP30, 23 février
2007
Q. Montrez
que les émeutes de 2005 peuvent être expliquées en recourant au concept
d’anomie.
Document 3 :
De manière plus générale, Karl Marx (1818-1883) estime que
l’oppression ou l’injustice ne suffisent pas à expliquer le conflit, d’autant
que les rapports sociaux sont généralement cachés et les acteurs
sociaux aliénés. Il insiste sur la notion de classe sociale «pour soi»,
c’est-à-dire sur la conscience d’intérêts communs, susceptible de pousser les
individus à entreprendre des actions communes. Ces classes naissent du lien
dynamique entre la conscience de classe et la lutte des classes : c’est dans la
lutte que se construit la conscience de classe, qui à son tour favorise la
lutte des classes.
Déclin ou évolution des conflits du travail ? Alternatives Economiques n° 275 -décembre
2008
Q. Montrez que Karl Marx considérait que les conflits
sociaux étaient sources d’intégration.
Document 4 :
Les conflits sociaux peuvent jouer un rôle essentiel dans
l’entretien du lien social. C’est le sociologue allemand Georg Simmel qui, au
début du XXe siècle, met le premier clairement en évidence leur dimension
socialisatrice. Il pointe ainsi le fait que l’affrontement, pourvu qu’il ne
vise pas l’élimination de l’opposant, implique plusieurs formes de
reconnaissance : de l’adversaire tout d’abord, auquel il s’agit de s’adapter,
mais
aussi de règles et, surtout, d’une cause commune autour
de laquelle on se confronte. Ce faisant, le conflit contribue à la réévaluation
périodique des règles qui fondent la vie sociale. En outre, à une échelle
individuelle, il permet également d’accepter l’altérité, notamment des
personnes dont on juge les comportements insupportables, tandis que la révolte permet
d’éviter d’être complètement écrasé par la domination. Au niveau du groupe mobilisé, le conflit agit
cependant comme une épreuve qui peut resserrer la cohésion interne ou conduire
à l’éclatement.
Un demi-siècle après Simmel, dans Les fonctions du
conflit social (1956), Lewis Coser systématise l’approche fonctionnaliste
en recensant les différentes façons dont un conflit - y compris guerrier – peut
contribuer à renforcer un lien social fragilisé, que ce soit en poussant différents
groupes à s’allier, en amenant des individus peu concernés à s’investir dans la
vie publique ou encore en obligeant les adversaires à communiquer.
Enfin, des travaux plus récents montrent comment
l’engagement peut venir compenser pour certains individus les effets d’une désaffiliation
sociale, qu’elle soit familiale ou professionnelle, en leur apportant des liens
de sociabilité, des connaissances et des compétences éventuellement valorisables
professionnellement, voire en leur apportant un emploi. Et surtout en
contribuant à restaurer chez eux une identité valorisante. Le conflit, facteur de
cohésion sociale. Encadré issu de l’article L’alchimie des conflits sociaux, Alternatives
Economiques n° 294 - septembre 2010
1. Pourquoi les conflits
sociaux ont-ils, selon Simmel, une dimension socialisatrice ?
2. Expliquez le passage
souligné. « il permet également d’accepter l’altérité, notamment des personnes
dont on juge les comportements insupportables, »
3. Recherchez le
sens de l’expression « désaffiliation sociale ».
Exercice 1 : recherchez deux exemples (un ancien et un récent)
de changement social provoqué par des conflits du travail
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